ED Sciences Sociales, ICM, Ville de Saint-Denis - Journée d’études
Saint-Denis territoire de migration ? (4)
Chercheur.e.s, actrices et acteurs locaux.ales en dialogues
Vivre ici et là-bas
Mardi 16 mai 2023 9h- 13h30
hôtel de ville de Saint-Denis
Éléments de contexte
Dans les anciennes villes industrielles de la couronne parisienne, et notamment à Saint-Denis, l’expérience migratoire tient une place importante, tant d’un point de vue historique que dans son actualité. Différents flux de populations infra et extra-nationaux ont été partie prenante de leur construction, de leur développement et de leur dynamique démographique. Les reconfigurations géopolitiques de l’après-guerre et notamment de l’ère post-soviétique ont remanié la cartographie des migrations internationales. Des migrant.e.s de l’après-guerre venu.e.s majoritairement des pays du Maghreb puis d’Afrique de l’Ouest et composant une partie des ouvriers de ces territoires, y ont habité et s’y sont installées. Les dynamiques actuelles, toujours en recomposition, se traduisent d’une part par des migrations d’origines variées, asiatiques ou du moyen orient par exemple, et par de nouveaux cursus professionnels (ou d’activité) d’autre part. La présence de compatriotes et d’associations de soutiens, l’existence d’un parc de logements modestes voire dégradés, permettent que ces villes restent des territoires d’accueil des populations migrantes.
Plus récemment, on ne peut manquer de mentionner des éléments qui, notamment par leur impact dans le nord est parisien (campements Porte de la Chapelle à Paris, avenue du Président Wilson à Saint-Denis…), relancent le débat sur les migrations et les engagements
citoyens et de la puissance publique. La « crise de l’accueil » des migrants de 2015 et l’accueil des Ukrainiens à partir de 2022 témoignent néanmoins du poids ambivalent de cette question dans le récit national. Par-delà ces événements, le phénomène migratoire est désormais compris comme inscrit dans le temps au rythme des conjonctures politiques, de systèmes institutionnels viables, du changement climatique et des crises qu’ils provoquent. De l’usine aux quartiers, des chantiers aux camps, la question des migrations s’est transposée dans des registres différents : de celui des travailleurs immigrés à celui des regroupements familiaux, aujourd’huiaux registres des réfugié·e·s et exilé·e·s , de l’intégration et des quartiers
en difficulté.
Au niveau des territoires, les pourcentages de personnes immigrées figurent dans de nombreux diagnostics et argumentaires en vue de les caractériser et construire des projets et actions visant à « l’intégration » des personnes considérées ( à Saint-Denis, 31% des habitant.e.s sont de nationalité étrangère et 38,4% sont immigré.e.s)1. Ce faisant, ils sont souvent présentés comme des indicateurs « négatifs » pour les territoires, associés à ceux de
pauvreté, de chômage, de difficultés sociales et économiques diverses pour les habitants (maîtrise de la langue, accès aux papiers, aux droits et aux services, etc.). Les migrations sont également souvent renvoyées aux tensions des rapports sociaux dans les espaces publics (incivilités, délinquance, etc.).
D’un autre côté, les migrations peuvent être valorisées dans les discours, notamment dans le champ culturel, à travers le dynamisme de villes jeunes, « Villes monde », au « carrefour de toutes les cultures ». Mais ne nous y trompons pas, souvent « Derrière les discours lénifiants sur les vertus du métissage et du cosmopolitisme s’exprime un raidissement autour des normes culturelles de la majorité » (Simon, 2015, p.93).
Au-delà de ces représentations, nos journées d’étude proposent de travailler à hauteur de la vie, des villes, des quartiers, pour mieux comprendre la question des migrations qui les traverse et sur lesquelles ils agissent en retour. Il s’agira notamment, à l’instar d’Anouk Flamant (2017), de situer les contextes et inviter à penser « le changement dans les politiques publiques, en l’occurrence le passage d’une politique d’intégration à une politique de lutte contre les discriminations raciales, [qui] nécessite de le saisir au prisme des configurations locales dans lesquelles il se produit. ». Motivation